Levadee de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар) - Страница 64

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— Parbleu, avait immédiatement estimé le policier, ces gens-là ne se sont pas évanouis, ne sont pas montés au ciel. Qui s’échappe par la fenêtre doit forcément atterrir quelque part. Or, la rue où nous nous trouvons, cette lugubre rue Froidevaux, est composée d’importants pâtés de maisons qui ne comportent guère de jardins, donc, fatalement, par où qu’ils aient passé, mes individus vont être obligés à un moment quelconque, de sauter sur la chaussée et de s’enfuir. Le tout est de se trouver au bon endroit.

Juve raisonnait, très calme. Peu lui importait les ordres qu’il entendait hurler par M. Havard à tous les échos, rien ne le troublait, même pas les exclamations et la colère de Jérôme Fandor. Tous couraient après Fantômas. Juve, lui, tranquillement, se cachait dans un coin d’ombre de la rue et là, comme s’il eût été en embuscade, se contentait d’attendre le bandit. La tactique qu’employait le policier et qui prouvait une fois de plus son extraordinaire sang-froid, l’empire qu’il avait sur ses nerfs réussit parfaitement. Juve n’était pas depuis cinq minutes en observation, qu’à moins de vingt mètres de lui un homme vêtu de noir sautait lestement d’un balcon dans la rue et s’enfuyait en courant.

Juve se jeta sur ses pas :

— À moi, hurla-t-il, c’est Fantômas ! Ah, cette fois, c’est bien le diable s’il m’échappe !

Tout en courant, tout en se précipitant sur les traces du bandit, – et Juve, certes, gagnant du terrain sur lui -, le policier avait saisi dans la poche de son paletot, son inséparable browning.

Le temps des procédés policiers était passé, ce n’était plus le moment de faire grâce. Si Fantômas ne s’arrêtait pas, Juve était décidé à faire feu, à l’abattre. Comme on abat une bête malfaisante, comme on met un monstre hors d’état de nuire.

Juve cria :

— Arrêtez-vous, Fantômas, ou je tire !

Malheureusement Juve avait déjà perdu quelques minutes. Dans la rue Froidevaux, déserte et solitaire, la tactique eût été bonne, car Juve, alors eût pu tranquillement tirer, mais déjà Fantômas avait tourné au coin du cimetière de Montparnasse, il débouchait place Denfert-Rochereau, et les passants étaient trop nombreux pour que, sans crainte d’accidents, Juve pût faire usage de son arme.

— Il sait bien que je ne peux pas tirer, s’écria le policier.

Fantômas, en effet, loin de s’arrêter aux injonctions de Juve, avait accéléré. À son tour, il gagnait du terrain sur le policier, qui moins jeune que lui, s’essoufflait.

Juve usa de la dernière ressource qu’il pensait avoir en son pouvoir :

Comme on s’écartait devant le bandit, Juve hurla désespéré :

— Au voleur. À l’assassin ! Arrêtez-le. C’est Fantômas !

Il eût annoncé le diable, il eût annoncé la mort, qu’il n’eût pas produit plus d’effet. Les passants étaient peut-être de braves gens, mais à coup sûr ce n’étaient point des gens braves. Voyant l’homme qui courait, entendant annoncer que c’était Fantômas, ils n’eurent les uns et les autres, qu’un sentiment : ne pas se trouver sur son chemin.

Panique générale. Les cris de Juve n’avaient eu qu’un résultat, on fit place nette devant le bandit.

Juve voyait déjà Fantômas hors d’atteinte, lorsqu’il eut la joie d’apercevoir à l’autre bout de la place Denfert-Rochereau, deux braves gardiens de la paix, émus par ses cris et par la fuite éperdue du public, qui accouraient, qui allaient barrer le chemin à Fantômas. C’était un renfort imprévu.

— Je le tiens, songea Juve. Ils vont l’arrêter.

Hélas, au moment même, Fantômas obliquait, tournait à droite, lui aussi avait aperçu les gardiens de la paix et, pour les éviter il ne trouvait rien de mieux que de s’engouffrer dans l’escalier de la station du métro. Juve n’hésita pas. Coupant au plus court, lui aussi courut à la station. Sa manœuvre lui avait fait gagner quelque distance sur Fantômas. Juve était en haut de l’escalier, quand le bandit ouvrait les portes qui mènent au vestibule où se distribuent les billets.

— Je le tiens, se répéta Juve.

Et au risque d’une chute il dégringola l’escalier… Naturellement Fantômas ne s’attarda guère à demander un billet. Sans souci des protestations des gens qu’il bousculait, il fonça dans l’un des couloirs qui s’ouvraient devant lui.

Et, à ce moment précis, Juve poussa un cri de victoire.

— Pincé, pensa-t-il.

Fantômas, en effet, venait de commettre une faute. Au lieu de se diriger vers l’un des escaliers conduisant aux quais du Métropolitain, il avait pris le couloir auquel vient aboutir l’escalier roulant qui amène, à l’arrivée de chaque train les voyageurs descendus dans le souterrain, à la hauteur du vestibule de la station. Et Juve qui s’était aperçu de l’erreur de parcours de Fantômas, riait presque, en se disant :

— Il est impossible que Fantômas descende par cet escalier qui monte, il va se jeter par terre, l’escalier me le ramènera. Je le tiens.

Le policier, pourtant, poursuivait toujours le bandit. Fantômas parvenait, comme l’avait deviné Juve à la hauteur de l’escalier roulant. Mais, ce que n’avait pas deviné Juve, c’était, une fois de plus, l’extraordinaire audace de l’Insaisissable.

D’un coup de poing formidable, Fantômas assomma à moitié l’employé du métropolitain assis au sommet de l’escalier pour surveiller le signal d’alarme. Fantômas s’empara du haut tabouret sur lequel était juché le malheureux surveillant. Ce tabouret, il le jeta sur les marches et, en même temps, il s’accroupit dessus. Le tabouret n’appuyant que sur les arêtes des marches, par ses montants de bois, glissa vers le bas comme sur un véritable toboggan, à une allure vertigineuse.

Ainsi, au moment même où Juve tendait la main pour arrêter Fantômas, le bandit, au risque de se fendre le crâne, sur son chariot improvisé, dégringolait l’escalier roulant.

De stupeur, Juve perdit quelques secondes. Il retrouva vite son sang-froid, il bondit à son tour vers le poste de surveillance, il appuya sur le bouton d’alarme, l’escalier s’immobilisa, Juve s’y lança, le descendit comme un fou.

Qu’était devenu Fantômas ? Emporté par son élan, Juve allait pénétrer sur les quais, voir si le bandit n’y était pas bloqué, lorsqu’en croisant l’escalier ordinaire, remontant au jour, Juve aperçut l’Insaisissable, qui, pensant bien l’avoir dépisté et après n’avoir fait qu’apparaître sur les quais, se hâtait de remonter au grand jour.

— Misérable, gronda Juve.

En même temps, il se précipita dans l’escalier, derrière Fantômas. La poursuite recommençait. Mais la ruse dont le bandit avait usé, lui avait permis de gagner quelque distance sur son poursuivant. Juve arriva tout juste à la sortie du métropolitain pour apercevoir le monstre sauter dans un taxi-auto, bientôt parti à toute vitesse. Une autre voiture automobile maraudait à quelque distance. Juve s’y élança :

— Cent francs si vous rattrapez la voiture qui s’en va là-bas.

La promesse d’un pourboire aussi royal produisit naturellement son effet sur le wattman abasourdi. Sans se soucier des gestes des agents, des récriminations des passants, à une allure de vertige, il lança sa voiture. Après la poursuite à pied, la poursuite en auto commençait.

Hélas, les deux véhicules, celui de Juve et celui de Fantômas, appartenaient à la même compagnie, étaient du même type, aussi bien réglés l’un que l’autre, conduits aussi expertement. Les deux taxis, sans se distancer, sans se rattraper, pendant de longues minutes, se livrèrent à une course folle.

— Si seulement, se disait Juve, il a l’idée de passer par les quartiers déserts, je risque le tout pour le tout, je tire sur lui. Mais il ne l’aurait pas fait.

Boulevard Montparnasse, boulevard Pasteur, boulevard Garibaldi, les deux véhicules continuaient leur match poursuite. Puis, brusquement par la rue Desaix, le taxi-auto de Fantômas obliquait sur la droite.

— Où va-t-il ?

En même temps, Juve se penchait vers son chauffeur :

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