Le mariage de Fantomas (Свадьба Фантомаса) - Страница 66

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— Qu’est-ce qu’il y a ?

— Il y a, fit-il, que si nous étions descendus dans la rue on était sûrement rencontrés par la police, tu n’as pas remarqué ce groupe ?

— Non.

— Eh bien, poursuivit Barnabé, c’étaient des agents, ils rôdaient autour de la charrette à bras que les copains de Fantômas n’ont pas fait disparaître. Sûr qu’il va y avoir du vilain.

— Eh bien, on est frais !

Et, le fossoyeur en chef se laissait choir, tombait littéralement sur la bordure d’un trottoir.

— Viens, par l’autre côté, nous sortirons du cimetière par l’avenue Rachel. Là, il n’y aura personne pour nous gêner et puis, après tout, il suffit de passer avec autorité, on est fonctionnaire, non ? Barnabé, on va s’en aller.

Soudain, le père Teulard s’arrêta :

— Barnabé, s’écria-t-il, il va falloir passer sous le pont.

— Sous le pont Caulaincourt ?

— Il le faut bien, n’ayons pas peur.

— Il y a pis que le spectre, le chemin que nous suivons en ce moment va nous obliger à passer à nouveau près de la fosse à peine refermée dans laquelle nous avons enterré la femme vivante.

Teulard recula :

— Non, cria-t-il, non, ne passons pas par là, on va prendre l’allée du sud, on fera un détour.

— C’est par là que s’est enfui Fantômas, nous allons sans doute le retrouver.

— Peu importe. Tout plutôt que de repasser là !

Ils avancèrent en silence, parvinrent, dans le voisinage du caveau de la famille de Gandia, c’est-à-dire à petite distance du pont Caulaincourt qui projetait sa grande ombre sur le cimetière. Soudain, les deux hommes poussèrent un cri, tombèrent l’un sur l’autre.

— Le fantôme, avaient-ils murmuré.

À quelques mètres, en effet, devant eux, se dressait la silhouette mystérieuse et tragique de l’énigmatique et sinistre apparition qui, depuis plusieurs semaines, terrifiait la capitale.

À ce moment, dissimulés derrière une tombe, les fossoyeurs apercevaient Fantômas, enveloppé dans sa grande houppelande jaune et coiffé de sa casquette de cocher.

Abasourdis, stupéfaits, les deux hommes hurlaient :

— Fantômas, sauve-nous, voilà le fantôme !

Cependant que Barnabé demeurait immobile, le père Teulard, dans un geste fou, se précipitait en direction de Fantômas.

Mais il s’arrêta net, battit des bras, s’écroula. Une détonation venait de retentir. Fantômas avait déchargé sur lui son revolver.

***

Cependant Juve, depuis les extraordinaires événements qui lui avaient permis de retrouver Fandor et de le tirer d’affaire, n’avait pas perdu une seconde.

Les quelques agents et les deux inspecteurs auxquels on confiait la garde de la nécropole étant insuffisants, on en augmenterait le nombre, on ferait tout ce qu’il faudrait, mais on sortirait du mystère.

Ce soir-là, M. Havard lui-même, Juve et quelques hauts personnages de la Sûreté, accompagnés d’une troupe innombrable d’agents soigneusement dissimulés dans tout le voisinage, épiaient les manifestations tragiques du cimetière.

Juve venait de remonter sur le pont Caulaincourt lorsque deux de ses hommes, essoufflés, arrivèrent en courant.

— Monsieur l’inspecteur, déclara l’un d’eux, nous venons de trouver une veste, une charrette à bras chargée de meubles, de meubles qui, sans doute, proviennent d’un déménagement. La charrette était abandonnée le long du mur du cimetière, et sur ce mur nous avons noté quelques égratignures fraîches, comme si des gens l’avaient escaladé.

Juve écoutait les agents et, vraisemblablement, allait leur donner des instructions, lorsqu’il les quitta soudain, traversa la chaussée et s’élança dans le cimetière par la grille entrouverte de l’avenue Rachel.

Il venait d’entendre une détonation et aussitôt courut dans cette direction.

— Par ici ! cria-t-il.

Cependant que M. Havard, à coups de sifflet, prévenait les hommes qu’il avait dissimulés sous le pont de se précipiter aussi sur les traces de Juve, Fandor, qui se trouvait sur les lieux, courait à l’entrée du cimetière où Léon et Michel étaient postés pour empêcher les évasions, si d’aventure de mystérieux malfaiteurs se trouvaient à l’intérieur de la nécropole.

Si Juve, ainsi, s’était précipité à travers les tombes, ce n’était pas seulement parce qu’il avait entendu une détonation, mais encore parce que, pour la première fois, il avait vu le spectre, vu, de ses yeux vu, l’extraordinaire apparition à laquelle, naturellement il n’avait jusqu’ici apporté aucune créance.

Or, cette fois, le policier n’avait plus à douter, ses yeux ne le trompaient point.

Et Juve courait si vite, qu’à peine avait-il aperçu l’extraordinaire vision qu’il était pour ainsi dire sur elle, la touchait.

C’était une silhouette extraordinaire, élégamment vêtue d’un habit noir à la forme irréprochable au milieu duquel le plastron faisait une tache blanche. Puis, il y avait ce visage terreux, cette face aux apparences blafardes.

Pendant qu’il bondissait vers le spectre, Juve, dont toute l’attention était retenue par cette vision ne voyait point se faufiler, à quelque distance de lui, une silhouette plus claire, un homme enveloppé dans un grand manteau jaune, Juve ne remarquait pas le cocher John.

— Mortel ou diable, criait-il, je l’aurai !

Et il tira sur le spectre.

Mais à ce moment, Juve entendit encore un nouveau coup de feu et, avec une agilité surprenante, il se laissait tomber par terre. Il était temps. Une balle passait au-dessus de sa tête.

Mais Juve, toutefois, ne s’en inquiéta pas. Le policier poussa un cri de triomphe : dans sa chute, ses bras lancés en avant avaient appréhendé le spectre aux épaules. Ce spectre était consistant, matériel, il avait une forme palpable, un poids.

Juve s’écroulait sur lui.

Mais, une seconde plus tard, le policier se relevait, stupéfait. Il n’y avait plus de spectre. Seulement, à quelques mètres de là, gisait un cadavre, un homme baigné dans son sang. Juve le reconnut : c’était le père Teulard.

Le policier, toutefois, n’allait pas au secours du fossoyeur que des agents accourus derrière lui relevaient avec précaution. Juve n’avait pas bougé et, avec un ahurissement sans pareil, il examinait quelque chose de flasque et de mou, qui demeurait sur le sol même du cimetière.

C’étaient les vestiges du fantôme, c’étaient ses vêtements, il ne restait de l’apparition qu’un habit noir, un pantalon, un plastron de chemise, le tout fait d’étoffe et de linge si fins qu’assurément on pouvait, en les pressant, les réduire au point de les faire tenir dans une poche, dans le creux de la main.

— Qu’est-ce qu’il y a, Juve ? qu’est-ce que c’est ?

C’était Fandor qui était accouru auprès de lui.

— Il y a, que le fameux spectre a disparu, mais je le tiens tout de même.

Et, soulevant la bizarre défroque, le policier la montrait à son ami :

— Parbleu, s’écria Fandor, c’est toujours la même histoire, toujours les vêtements sans corps, les mêmes que ceux que j’ai découverts, que les uns et les autres nous avons trouvés ici. Vous n’en savez pas plus, Juve, que nous n’en savions hier.

— Si, proféra-t-il, j’en sais plus long, parce que j’ai compris.

Juve, en fouillant les vêtements, venait d’en extraire un objet extraordinaire, une chose qui, au premier abord, paraissait indéfinissable. C’était une véritable peau, légère et souple, à peine consistante, mais robuste tout de même.

— De la baudruche, s’écria Fandor.

— Tu l’as dit, s’écria le policier qui ajoutait :

— Et une baudruche assez consistante pour demeurer gonflée si d’aventure on y introduit de l’air comprimé, de l’air soufflé. Oh rien n’est plus simple à comprendre désormais, le mystérieux personnage qui s’est plu à nous donner le spectacle terrifiant et incompréhensible de ce spectre n’a pas fait un grand effort d’imagination pour concevoir cet appareil. On vend dans le Marais des bonshommes en baudruche de ce genre, à bas prix. Il lui a suffi de s’en procurer quelques-uns et de leur mettre ces vêtements qui ont si bien intrigué tout le monde et semé la peur.

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