Lassassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам) - Страница 88

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— C’est un coup de Fantômas ! Il ne veut sans doute pas leur donner du pèze, il leur en a fourré un peu et pour être tranquille, désormais, il les fait poisser.

***

Pendant la rafle, cependant, un homme brun, rasé, simplement vêtu, était allé s’attabler dans un café de bonne apparence qui était situé au carrefour Barbès.

Il resta là une heure, à peu près, ne prenant même pas la peine de rentrer à l’intérieur de l’établissement.

Assis à la terrasse, il semblait en proie à une rêverie profonde. C’était Fantômas. Or, depuis quelque temps, depuis surtout la mort de sa maîtresse, le bandit semblait prostré, anéanti.

Le sinistre Maître de l’Effroi, que l’on soupçonnait cependant d’être l’auteur de ce crime abominable, avait-il des remords, ou simplement, innocent du forfait horrible, éprouvait-il un profond chagrin ?

Nul n’aurait pu le dire.

Lorsque la rafle s’était produite dans le cabaret du père Korn, Fantômas en avait eu les échos. Puis, voulant sans doute questionner Bouzille qu’il avait aperçu, passant sur le boulevard Barbès, il l’interpella.

— Bonjour Bouzille !

L’ancien chemineau se retourna et immédiatement reconnut le Maître de l’Effroi.

— C’est vous ? c’est toi, Fantômas ?

— Oui Bouzille. Ça va bien ?

— Pas mal et vous ?

Le bandit ne répondit pas. Simplement il demanda :

— Tu as vu l’arrestation ?

Bouzille, qui était d’une naïveté et d’une inconscience vraiment surprenantes, ne tremblait pas une minute devant le tortionnaire. Même, sa gaieté native reprenait le dessus et c’est en riant presque qu’il répondit :

— Ben… vous savez c’était soigné. Non, tout de même, c’est pas chic Fantômas. Vrai, c’est pas des trucs à faire à des copains !

Fantômas avait l’air profondément étonné de ces paroles ; presque durement, cette fois, il interrogea :

— Qu’est-ce que tu racontes-là, Bouzille ? Qu’est-ce qui n’est pas chic ?

— C’est vous qui faites poisser vos amis, maintenant, j’aurais pas cru ça de vous, Fantômas.

Le Maître de l’Effroi sembla, à ces paroles légèrement tressaillir. D’une voix changée, il déclara :

— Comment les flics sont-ils arrivés ?

— Ben, comme ça, sans dire ouf.

Fantômas, trop éloigné de l’endroit de l’arrestation, n’avait pas distingué quels étaient au juste les individus arrêtés, si la rafle avait été faite par de simples sergents de ville attirés par du bruit, le tapage infernal des apaches dans l’établissement ou si, au contraire, l’arrestation avait été méditée d’avance et opérée par des agents de la Sûreté.

Bouzille, vraie gazette vivante, donna à Fantômas toutes les explications nécessaires. Il cita les noms des prisonniers et déclara encore :

— J’ai reconnu les deux policiers Léon et Michel, ils étaient avec des cognes de la Préfecture.

Fantômas, cette fois, n’ajouta pas un mot, il quitta Bouzille et en marchant, le bandit dont le nom seul suffisait à provoquer l’effroi, celui qu’on surnommait le Tortionnaire, semblait lui-même effrayé, livide et tremblant :

— C’est abominable, murmurait-il, c’est un guet-apens, une trahison effroyable, que se passe-t-il donc ? Je n’y comprends plus rien. Il faut absolument que je sorte de cette abominable situation. Je veux savoir. Et coûte que coûte, je saurai !

29 – FANTÔMAS ET FANTÔMAS

Juve, installé dans le petit salon du modeste appartement qu’il occupait au cinquième, rue Tardieu, fumait béatement une cigarette, les yeux perdus, suivant distraitement les nuages de fumée qui montaient au plafond.

Il pouvait être environ dix heures du matin, un gai soleil de printemps illuminait la pièce.

C’était quarante-huit heures après la fameuse nuit d’Enghien et vingt-quatre heures après la nuit non moins bizarre et tragique du boulevard de la Chapelle, au cours de laquelle les inspecteurs Léon et Michel avaient arrêté quelques-uns des individus que l’on soupçonnait fort d’avoir été les complices directs de Fantômas dans l’affaire du Comptoir National.

Les captures récentes n’intéressaient, d’ailleurs, pas autrement Juve.

Il reconnaissait préférable de savoir sous les verrous des gens tels que ceux qu’on venait d’arrêter, mais là, n’était pas pour lui l’important, l’essentiel. Il estimait que boucler les comparses n’était rien, et qu’on n’enrayait le mal qu’à la condition de s’attaquer aux racines mêmes de celui-ci. Du reste, Juve, depuis deux jours, était intrigué au plus haut point.

— Fandor, déclarait le policier à son ami, qui se trouvait dans le salon, je crois que bientôt j’aurai du nouveau à t’apprendre. Il y a en ce moment un mystère qui dépasse tout ce que tu peux imaginer. Mais, j’ai confiance en l’avenir, nous l’éclaircirons.

— Vous voulez parler des histoires d’Enghien ? Eh bien, moi, je vous fiche mon billet, Juve, que vous vous trompez tout de même. Il n’y a pas d’erreur, c’est bien Fantômas qui m’a endormi et vous avez dû rêver quand vous l’avez vu chez Sarah Gordon à l’heure où moi-même j’étais en conversation avec lui.

— Je n’ai pas rêvé, Fandor, et c’est toi qui n’as pas eu affaire à Fantômas.

— Alors à qui donc bon Dieu ? Et pourquoi un autre type que Fantômas m’aurait-il chloroformé ?

Mais le journaliste s’arrêta net. On entendait le bruit d’une altercation dans l’antichambre.

— Monsieur ne reçoit pas, vous n’entrerez pas !

— Je vous jure que j’entrerai. Il faudra bien qu’il me reçoive, c’est trop grave.

Juve avait reconnu la voix de son vieux domestique ; celui-ci se disputait avec quelqu’un. Au moment où le policier et Fandor se rapprochaient de l’antichambre pour voir ce qui se passait, l’interlocuteur qui forçait la consigne entra brusquement dans la pièce.

Et aussitôt, il déclara, apercevant l’inspecteur de la Sûreté :

— Je vous fais toutes mes excuses. Je vous demande bien pardon d’agir aussi brutalement, mais il fallait que je vous voie à toute force.

Le policier venait de regarder fixement son interlocuteur :

— Vous êtes, dit-il, si je ne me trompe, M. Dick, l’acteur du Théâtre Ornano, le premier prix du Conservatoire, qui, dédaignant la Comédie-Française, préfère jouer dans les établissements de quartier ?

— Je vous en prie, interrompit l’artiste – car c’était lui en effet – ne jugez pas ma carrière dramatique, mais écoutez-moi, renseignez-moi :

— De quoi, s’agit-il, fit Juve, qui, désignant Fandor du geste de la main, ajouta : vous pouvez me parler, monsieur, monsieur est mon ami, Jérôme Fandor.

Dick s’inclina, cependant qu’un léger sourire ironique errait sur ses lèvres :

— Je connais M. Fandor, murmura-t-il.

Puis, il s’interrompit pour reprendre, en se tournant vers Juve :

— Monsieur, fit-il, en se passant la main sur le front, vous voyez devant vous un homme troublé, très troublé. Je suis immensément épris d’une femme.

— Passez, monsieur, je sais, nous savons qu’il s’agit de miss Sarah Gordon, l’Américaine.

— Comment le savez-vous ?

— Je le sais, parce que je le sais, répliqua Juve, et l’essentiel, c’est, n’est-ce pas, que je le sache. En quoi cela peut-il, d’ailleurs, nous intéresser ?

— Ah, monsieur, ne raillez pas ma douleur… Sarah a disparu, subrepticement, depuis hier. Mes efforts pour la retrouver ont été vains. Je viens m’adresser à vous, monsieur, car je vous sais le plus subtil, le plus adroit des policiers.

Juve se leva :

— J’ai horreur des compliments, monsieur, et je vous remercie, par avance, de tout ce que vous comptiez me dire. J’avais d’ailleurs prévu votre visite, je vous attendais.

— Ah vraiment, pourquoi ?

— Parce que, répliqua Juve, étant donné que vous cherchiez miss Sarah Gordon, il était naturel que, ne l’ayant pas découverte, vous veniez demander où elle se trouvait à la seule personne qui soit capable de vous renseigner.

— Et cette personne, monsieur ? interrogea Dick.

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